RDC-La nomination du Général Pacifique Masunzu : une stratégie calculée ou un piège politique ?
La nomination du Général Pacifique Masunzu à la tête de la 3ème zone de défense, couvrant les provinces du Maniema, Nord-Kivu, Sud-Kivu, Bas-Uélé, Tshopo, Haut-Uélé et Ituri, suscite de nombreuses interrogations. Cette décision de Félix Tshisekedi, président de la République démocratique du Congo (RDC), semble être une initiative stratégique, mais certains y voient également un potentiel «cadeau empoisonné » pour le Général Masunzu. Voici une analyse des enjeux de cette nomination.
Le Général Pacifique Masunzu n’est pas un inconnu dans la région du Kivu. Originaire de cette zone, il en connaît la géographie, les dynamiques communautaires et les mécanismes des groupes armés qui y opèrent. Son parcours de chef militaire et de stratège, marqué par sa défection du contrôle rwandais en 2002 et la création du Front de Résistance Patriotique (FRF), en fait un acteur-clé de la région. Cette expérience pourrait s’avérer cruciale pour coordonner les opérations militaires contre les rébellions locales et le M23.
La nomination d’un Général d’origine tutsi envoie un signal fort. Depuis plusieurs années, le M23, appuyé par Kigali, justifie sa lutte par une prétendue marginalisation des Tutsi en RDC. En confiant un rôle aussi stratégique à un militaire tutsi, Tshisekedi s’oppose à ce narratif. Cette nomination renforce l’image d’un pouvoir inclusif et démontre que l’armée congolaise (FARDC) ne discrimine pas ses officiers en fonction de leur origine ethnique.
Cette nomination pourrait être interprétée comme une application du principe «diviser pour mieux régner». Le M23, composé en majorité de Tutsi, se retrouve confronté à un haut gradé tutsi au sein des FARDC. Cette situation pourrait semer la confusion et créer des dissensions au sein de la rébellion et de la communauté tutsi congolaise. Cette décision pourrait également fragiliser les allégeances au sein de la communauté banyamulenge, dont le soutien au M23 n’est pas monolithique.
Le Général Masunzu se trouve dans une position où l’échec n’est pas permis. Sa connaissance du terrain et son passé de stratège font de lui un profil idéal pour combattre le M23. Cependant, cette même expérience le place sous une pression considérable. Toute contre-performance dans ses missions pourrait être interprétée comme un manquement à ses obligations militaires, voire comme un acte de trahison.
Dans le contexte actuel, les replis stratégiques et la perte de territoires face à l’ennemi sont assimilés à des actes de trahison, passibles de la peine de mort au sein de l’armée congolaise. Étant d’origine tutsi, le Général Masunzu pourrait être plus exposé à de telles accusations. Cette situation soulève la question de savoir si cette nomination n’est pas une manœuvre visant à se débarrasser d’un officier devenu encombrant.
Pour le Général Masunzu, l’enjeu est colossal. Sa propre carrière est en jeu, mais également sa réputation au sein de la communauté banyamulenge et des FARDC. La défaite de ses troupes pourrait être exploitée par ses détracteurs pour remettre en cause sa fidélité à l’État congolais. Cette responsabilité accrue pourrait bien être perçue comme un « cadeau empoisonné ».
Pacifique Masunzu, bien que Général, est aussi un ancien rebelle. Son passé au sein du FRF et ses alliances d’autrefois pourraient être réactivés par ses adversaires au sein de l’armée. D’autres officiers des FARDC pourraient le voir comme un «parachuté » au sommet, ce qui pourrait créer des frictions internes. Dans cette optique, la nomination de Masunzu apparaît moins comme une opportunité et plus comme un piège.
Veritasinfo