Lettre ouverte au S.G de l’ONU : Erreur manifeste d’appréciation du HCR sur la clause de cessation du statut de réfugiés rwandais.
Son Excellence Son Excellence M.Antonio Gutteres
Secrétaire général des Nations Unies
New York, NY
États-Unis d'Amérique
Secrétaire général des Nations Unies
New York, NY
États-Unis d'Amérique
Lyon le 30/11/2017
Objet : Le RIPRODHOR dénonce l’erreur manifeste d’appréciation du HCR sur la date de mise en application de la clause de cessation du statut de réfugiés rwandais.
Monsieur le Secrétaire général des Nations Unies
Votre engagement sans faille pour la cause des réfugiés et votre longue carrière politique et diplomatique vous ont valu d’être élevé au poste de Secrétaire général du Haut Commissariat des Réfugiés en 2005 et en 2010, avant d’être élu à la fonction prestigieuse mais trop exigeante de Secrétaire général des Nations Unies en 2016. Le RIPRODHOR vous remercie très sincèrement pour cette ascension fulgurante, qui fait de vous un des hommes atypiques les plus respectés au monde.
Si le RIPRODHOR vous demande aujourd’hui de ramener la question des réfugiés rwandais sur votre table de travail, c’est qu’il constate amèrement que les menaces d’extermination auxquelles ils font face actuellement, trouvent leur origine dans les turpitudes des décisions de cessation de leur statut prises par le HCR, alors sous votre gouverne en 2009. Devant l’impossibilité évidente d’appliquer les mesures arrêtées par votre organisation d’alors, vous en aviez repoussé les échéances tout en vous soumettant au dictat du Rwanda qui maquillait ses rapports et ses statistiques pour vous convaincre de son avancée démocratique et de sa conversion aux valeurs universelles des droits de l’homme. Son miracle économique tant vanté s’est révélé être un mirage, puisque le Rwanda reste le pays le plus pauvre de la région hors le Burundi, avec un revenu de 697.3 $ par habitant contre 1.376 $ pour le Kenya, 705 $ pour l’Uganda, et 879 $ pour la Tanzania. Quant à la gouvernance démocratique et au respect des droits fondamentaux, vous êtes sans ignorer que le Rwanda a la palme d’or d’être parmi les régimes les plus répressifs des Nations Unies. Des nombreux rapports crédibles ne cessent de décrier la répression politique, des assassinats extrajudiciaires, des enlèvements au Rwanda et à l’étranger, des fraudes électorales et la corruption rampante alliée à l’accaparement des richesses du pays.
Curieusement, le HCR a trop fermé les yeux sur la réalité des violations massives des droits de l’homme qui se commettaient en sa présence. Il a trop fermé ses oreilles aux cris de détresse des réfugiés poursuivis comme du gibier dans leurs derniers retranchements ou torturés jusqu’à leur exténuation s’ils étaient de retour au Rwanda. La commodité de la myopie et de l’autisme du HCR vis-à-vis de la tyrannie du régime du Président Kagame ne se dément pas, quand on sait qu’il a lu les rapports des Nations Unies sur les tentatives d’extermination des réfugiés en RCD selon lesquels : «Les attaques systématiques dans presque tout le pays… lesquelles visaient un très grand nombre de réfugiés hutus du Rwanda et de membres des populations civiles hutues, se traduisant par leur extermination, révèlent un grand nombre de circonstances aggravantes qui, si elles devaient être prouvées devant une cour compétente, pourraient alors être qualifiées de crimes de génocide» Ceux qui accusent le Président Kagame d’avoir massacré les leurs ne peuvent pas vivre tranquilles au Rwanda, sans une garantie internationale contre ses représailles pour continuer à se couvrir d’impunité.
L’acharnement du Rwanda à faire adopter la clause de cessation du statut de réfugiés par le HCR et les pays d’accueil des réfugiés n’a rien d’humanitaire. Il s’inscrit dans sa volonté inébranlable de poursuivre les tentatives de leur extermination entamées en RDC. En témoigne la violence avec laquelle le Président Paul Kagame a réagi à l’appel calme de l’ex Président tanzanien, Son Excellence Yakaya Kikwete lancé à ses homologues de la région des grands lacs qui les invitait à négocier avec leurs opposants. N’a-t-il pas déjà condamné les réfugiés en refusant de leur parler sous prétexte qu’ils sont tous passibles des crimes de génocide et des crimes contre l’humanité dans le mépris total de leur droit à la présomption d’innocence.
Le HCR persévère dans son erreur quand il annonce que cette fois-ci la clause de cessation devra s’appliquer au 31 décembre 2017 comme l’exige le Rwanda qui jusqu’à présent ne fait rien pour approcher les concernés pour les rassurer. Le Rwanda pousse son ironie cynique à l’extrême quand il laisse ses ressortissants dépérir devant ses portes chez ses voisins pour aller au Moyen Orient se faire remettre plus de 40.000 réfugiés érythréens, éthiopiens, et soudanais, contre un prix de 5.000$, qu’Israël ne tolère plus sur son territoire à cause de la couleur noire de leur peau. Comble de perversion, le Rwanda s’empresse de voler la vedette aux pays dont les citoyens sont tombés dans la trappe de l’esclavagisme libyen. Profitant du choc et de l’émotion provoqués par la publicité inattendue de ce drame, il s’arroge le droit de rapatrier sur son territoire exigu plus de 30000 migrants tchadiens, nigérians, camerounais et congolais, pour faire oublier qu’il avait acquiescé au complot qui a donné lieu à la situation chaotique actuelle de ce Pays. Comme la charité bien ordonnée ne commence que par soi, le Président Kagame devrait penser au rapatriement de ses réfugiés en dignité, avant de songer à distribuer des terres qu’il n’a pas, aux tchadiens, aux nigérians, aux camerounais et aux congolais. Tous les signes sont là pour montrer que le sort de ces africains ne pourrait s’améliorer s’ils ne faisaient que changer de mains entre les esclavagistes libyens et les prédateurs rwandais qui ont en commun, la vertu de ne braver aucun interdit.
Le jeu dangereux du Rwanda ne vous est pas inconnu puisque en octobre dernier le Sous-comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (SPT) des Nations Unies dépêché au Rwanda, a dû suspendre sa mission d’enquête sur des cas de torture dont le Rwanda était accusé. C’était suite aux manœuvres d’obstruction de la part du gouvernement rwandais et aux menaces de représailles à l’encontre des informateurs. Si les raisons de la suspension de la mission du sous-comité contre la torture sont compréhensibles, il est regrettable de constater qu’à ce jour, il n’ait rien fait qui puisse secourir les victimes qu’il a laissées entre les mains de leurs bourreaux.
Les réfugiés rwandais ne sont pas en manque de patriotisme pour qu’on ait à les forcer à rentrer chez eux. Ils ne sont pas en manque de nostalgie du climat doux et des campagnes verdoyantes du Pays des Mille Collines. Mais ils n’ont pas non plus la mémoire courte pour ne pas se souvenir que les intore : ces miliciens- sentinelles du régime les attendent de pied ferme avec des bombes, des grenades, des prisons mouroirs, des discriminations ethniques. Ils n’ont pas à se jeter dans la gueule largement ouverte de « l’ogre impitoyable » de Kigali qui promet de les dévorer. Voilà pourquoi il faut considérer que les circonstances qui ont poussé les rwandais à fuir leur pays existent toujours et que les changements fondamentaux et durables allégués ne sont qu’une simple mystification d’intoxication médiatique.
Compte tenu de votre situation actuelle au perchoir des Nations Unies et de votre implication personnelle dans l’élaboration de la stratégie visant à mettre prématurément fin à la situation des réfugiés rwandais par le feu vert que vous avez accordé au démarrage du processus de cessation :
Le RIPRODHOR en appelle à votre très grande responsabilité de Secrétaire Général des Nations Unies et de garant du respect du droit international dont la convention des réfugiés de 1951, pour vous demander de reporter la date effective de mise en application de la clause de cessation du statut des réfugiés rwandais.
Le RIPRODHOR vous demande de stimuler le HCR, le Rwanda et les pays d’accueil de ses réfugiés à associer ces derniers aux prises de décision qui les concernent, en matière de retour volontaire, et d’installation dans un pays tiers notamment.
Le RIPRODHOR vous demande de vous adresser expressément aux autorités du Rwanda pour leur rappeler leur éminent rôle de dialoguer avec leurs compatriotes en exil afin de créer ensemble les conditions politiques, sociales, économiques et juridiques de retour en dignité et de leur insertion.
Veuillez agréer, Excellence Monsieur le Secrétaire général, l’assurance de notre très haute considération.
Théobald RUTIHUNZA
Président du RIPRODHOR
Réseau International pour la promotion et la défense des droits de l’Homme au Rwanda, Association Loi 1901
60 rue Mathieu DUSSURGEY, 69190 SAINT FONS
TEL.33 7 63 16 64 58