Francophonie : Michaëlle Jean contre-attaque et défend son bilan !
Menacée à la tête de la Francophonie par une concurrente rwandaise soutenue par la France, la Québécoise Michaëlle Jean contre-attaque et défend son bilan: «j’ai positionné la Francophonie sur l’échiquier multilatéral», assure-t-elle dans son premier entretien depuis le dépôt de cette candidature.
QUESTION: Qu’avez-vous accompli depuis votre élection en 2014 en tant que secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF, 84 États et gouvernements)?
REPOSE: On aura accompli beaucoup. Dans le prolongement de mes prédécesseurs, j’ai positionné la Francophonie sur l’échiquier multilatéral en renforçant nos accords de coopération avec par exemple les Nations unies. Nous sommes présents lors des forums internationaux où des décisions extrêmement importantes se prennent. Je parle autant aux équipes de la Francophonie qu’à celles des Nations unies, de l’Union africaine, de l’Union européenne.
Nous avons outillé les pays pour qu’ils aient la capacité de se faire entendre en français. Nous les avons aidés face au FMI, à la Banque mondiale ou à l’Organisation mondiale du commerce à maîtriser davantage leur plaidoyer. Nous formons les négociateurs francophones sur le climat. Nous travaillons en étroite collaboration sur les opérations de maintien de la paix dont la moitié d’entre elles sont déployées en espace francophone.
L’investissement dans le capital humain a été une priorité, avec une stratégie qui met l’accent sur le soutien à l’entrepreneuriat, en particulier des femmes. Nous avons déployé des incubateurs sur 13 pays. Nous avons mis en place à Dakar ce nouvel Institut de la Francophonie pour l’éducation et la formation : l’avenir de la langue française est en Afrique, il faut donc s’assurer d’un accès plus grand à l’éducation et remettre l’accent sur la formation des maîtres: rien qu’en Côte d’Ivoire, 20.000 d’entre eux sont en cours de formation.
Q: Quelles seraient les priorités de votre nouveau mandat si vous êtes reconduite lors du Sommet de la Francophonie en octobre en Arménie?
R: Il reste beaucoup à accomplir. Le numérique par exemple: avec la révolution technologique qui bouscule tout, il faut que la Francophonie se saisisse pleinement de ce sujet, car les multinationales qui ont le contrôle de ces technologies sont surtout dans le monde anglo-saxon.
Q: Le nombre de francophones devrait tripler d’ici à 2050, à 750 millions, grâce à l’explosion démographique en Afrique, poussant beaucoup à dire que votre poste devrait être détenu par un ou une Africain(e), comme votre concurrente la ministre rwandaise des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo.
R: Je suis Haïtienne et Canadienne afrodescendante. Les chefs d’État en Afrique me parlent d’africanité globale. Ils disent que je ne suis pas tombée des arbres, mais d’une histoire: les afrodescendants font partie aussi de cette réalité africaine. Je suis une femme du Sud et du Nord, avec cette double expérience et une vraie connaissance de l’Afrique. J’avais effectué de nombreux voyages en Afrique en tant que gouverneure générale du Canada (représentante de la reine d’Angleterre au Canada, de 2005 à 2010).
Q: Soutenue par la France et par Paul Kagame, président en exercice de l’Union africaine, Mme Mushikiwabo n’est-elle pas grande favorite?
R: Il faut poser la question aux chefs d’État et de gouvernements. Nous sommes 84. Je ne vais pas commenter le choix de l’un ou de l’autre.
Source : journaldemontreal.com