Brexit: «La voix de l’Ecosse ne peut être ignorée»
Nicola Sturgeon annonce un nouveau référendum sur l'indépendance de la province, alors que Theresa May pourrait invoquer mardi l'article 50 qui enclenche la sortie du Royaume-Uni de l'UE. Ce n’est pas comme si la situation n’était pas déjà assez compliquée. Mais la voici sur le point de se compliquer encore. Nicola Sturgeon, cheffe du gouvernement semi-autonome écossais, a annoncé ce lundi son intention de proposer la tenue d’un second référendum sur l’indépendance de l’Ecosse. Et Theresa May, qui pourrait invoquer l’article 50 dès mardi, et donner ainsi le coup d’envoi de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, se retrouve avec un problème supplémentaire, et de taille, sur les bras.
Il y a deux ans, le 18 septembre 2014, les Ecossais avaient rejeté à 55% l’indépendance. Mais entre-temps, les circonstances ont changé, brutalement. Le Royaume-Uni a voté le 23 juin en faveur d’une sortie de l’UE. Or l’Ecosse a, pour sa part, choisi à 62% de rester européenne. Depuis le vote, le gouvernement écossais, dominé par le parti indépendantiste de Nicola Sturgeon, le Scottish National Party (SNP), tente d’influencer la Première ministre britannique, Theresa May, pour limiter l’impact du Brexit, en insistant notamment sur la nécessité de rester membre du marché unique.
«Peuple écossais»
«Or, le gouvernement britannique n’a pas bougé d’un centimètre en faveur d’un compromis», a constaté Nicola Sturgeon, qui a ajouté que l’annonce en janvier par Theresa May que le Royaume-Uni avait l’intention de sortir du marché unique et de l’union douanière avait été «faite sans consultations préalables. Toute notion de partenariat [avec l’Ecosse, ndlr] a totalement disparu. La voix de l’Ecosse ne peut être ignorée sur un tel sujet. Il ne s’agit pas seulement de la question de notre relation avec l’Europe mais également du genre de pays que nous souhaitons être». Et cette décision doit revenir «au peuple écossais», a dit la First Minister.
Idéalement, le référendum devrait être organisé entre «octobre 2018 et le printemps 2019», soit avant la fin officielle des négociations sur le Brexit. A l’heure actuelle, les sondages donnent toujours une légère majorité en faveur du maintien de l’Ecosse au sein du Royaume-Uni, mais l’écart se resserre. L’avantage du SNP est que ses troupes sont aguerries, en ordre de marche, après deux référendums et une élection générale en deux ans. D’autre part, alors que le "non" des Ecossais au premier référendum était lié à la peur du saut dans l’inconnu de l’indépendance, cette fois-ci, le «oui» à l’indépendance signifierait rejeter l’inconnu du Brexit.
Mains libres
Bien sûr, Theresa May et le Parlement de Westminster peuvent techniquement s’opposer à la tenue du référendum, mais ce serait politiquement difficile à justifier. Nicola Sturgeon a convoqué en hâte cette conférence de presse dimanche soir, dès lors qu’il est apparu clair que l’invocation de l’article 50 pourrait intervenir dès mardi. La Chambre des communes débat une nouvelle fois ce lundi après-midi sur la loi sur l’article 50. Le gouvernement espère convaincre les députés de récuser les deux amendements adoptés par la chambre haute du parlement, les Lords, sur la garantie du statut des citoyens européens résidents au Royaume-Uni et sur l’obligation d’un vote au parlement sur le résultat final des négociations.
Si les députés rejettent ces amendements, ce qui semble probable, la loi repartira aux Lords et ces derniers ont laissé entendre qu’ils ne s’opposeraient pas une seconde fois à la loi. Dans ce cas, elle pourrait être officiellement adoptée tard dans la nuit et Theresa May aurait alors les mains libres pour déclencher l’article 50. Elle doit s’exprimer mardi à la Chambre des communes.
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