Rwanda – Belgique : La mobilisation parlementaire occidentale s’intensifie pour Victoire Ingabire
Demande d’explications de Mme Sabine de Bethune au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères et des Réformes institutionnelles sur «l’arrestation de Mme Victoire Ingabire Umuhoza au Rwanda» (n° 5-27)
Mme Sabine de Bethune (CD&V). – Ma question date du 20 octobre, car à ce moment des nouvelles inquiétantes nous parvenaient à propos de Madame Ingabire qui, au nom des FDU, voulait participer aux élections présidentielles rwandaises. Directement après son arrivée au Rwanda, le 16 février de cette année, sa liberté de mouvement a été restreinte. En février, elle a été accusée "d'idéologie génocidaire". De plus elle a été exposée à toutes sortes d'intimidations et plusieurs de ses alliés ont été arrêtés par les autorités rwandaises. Des observateurs étrangers commençaient de plus en plus à être convaincus que le gouvernement mettait tout en oeuvre pour l'empêcher de participer aux élections. Le 21 avril, elle fut arrêtée officiellement pour " participation à une organisation terroriste et négationnisme". Dans la première partie d'octobre, la situation de madame Ingabire a empiré. Les informations que nous recevions étaient minimes, mais nous avons quand même appris qu'avant son arrestation, les autorités rwandaises avaient augmenté les forces de police autour de sa maison. A ce moment-là, à Kigali, des rumeurs couraient notamment selon lesquelles la Belgique mettait tout en oeuvre pour l'extrader vers notre pays. Cependant, nous présumons que ces rumeurs ne servaient qu'à justifier l'augmentation de la présence policière autour de son domicile. Le 14 octobre, elle fut finalement arrêtée sous le chef d'inculpation d'activités terrotistes et elle fut transférée au bâtiment de la police de Kicukiro. Au début, personne ne pouvait lui rendre visite. Entre-temps, nous sommes à presque un mois plus tard, elle a été transférée à la prison centrale de Kigali. Nous apprenons de la part d'organisations internationales qu’ elle est maintenant détenue dans des conditions convenables. Elle a plusieurs avocats: un Rwandais, un Britannique et un Hollandais. Le 8 novembre, elle a comparu devant le tribunal d'appel afin de demander sa mise en liberté sous caution, mais cela lui a été refusé le 11 novembre par le tribunal. Le 12 novembre, le porte-parole du parquet aurait déclaré que le procès aurait lieu dans un mois. Madame Ingabire craint quand même encore pour sa sécurité. Les questions que j'ai soumises il y a un mois au ministre, ne sont plus toutes aussi appropriées. Entre-temps, il a effectivement été confirmé que Madame Ingabire a été arrêtée et qu'elle a aussi été amenée à la cour de justice. Les conditions matérielles de son arrestation, sur lesquelles j'avais aussi demandé plus d'informations, étaient, avons-nous appris, initialement très, très mauvaises, mais entre-temps elles se seraient améliorées. Son entourage et ses avocats restent quand même très inquiets pour sa sécurité. Les autres questions restent
cependant tout à fait actuelles. La Belgique préside en ce moment l'Union Européenne et cette dernière est l'actrice désignée pour suivre de près la problématique des droits de l'homme et des droits démocratiques des civils rwandais. L'été passé, nous avons tous suivis les élections au Rwanda et avons appris ce qu'il s'est passé avec les autres dirigeants des partis d’opposition qui voulaient participer aux élections. A l'approche des élections, certains ont perdu la vie dans des circonstances obscures. Cela signale quand même une situation générale inquiétante. Est-ce que des initiatives ont été prises par le ministre au nom de l'UE afin de soulever la question de la détention de Madame Ingabire parmi les partenaires européens ou auprès des autorités rwandaises et de suivre le dossier? Steven Vanackere, vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères et des Reformes Institutionnelles
Madame Ingabire a effectivement été arrêtée le 14 octobre. Juridiquement parlant, il s'agit de la levée de sa liberté conditionnelle qui date d'avril dernier, lorsqu'elle fut arrêtée pour la première fois en raison d’ « idéologie génocidaire, divisionnisme et participation à un groupe terroriste », les Forces Démocratiques de Libération du Rwanda, les FDLR. Le ministère public a jugé que Madame Ingabire a violé les conditions de sa mise en liberté en continuant ces activités. De nouveaux faits et le risque de destruction de preuves ont été cités pour justifier sa détention. Juridiquement, Madame Ingabire se trouve depuis le 26 octobre dans une situation de détention provisoire et son arrestation doit être réévaluée tous les 30 jours par la justice et être éventuellement prolongée. Le 26 octobre, Madame Ingabire fut encore détenue au commissariat de Kicukiro dans des conditions relativement inhumaines. Ainsi, les premiers jours, elle devait dormir par terre(ou « à même le sol).
Depuis son arrestation, l'ambassade belge a eu des contacts réguliers avec son avocat, les membres de son parti politique et avec le Comité Internationale de la Croix Rouge, qui ont tous confirmé qu'elle se porte bien.
Les rumeurs selon lesquelles la Belgique aurait essayé de l'extrader vers notre pays ne correspondent pas à la vérité. La Belgique a depuis, son arrestation du 14 octobre, évoqué deux fois le dossier de Madame Ingabire auprès des autorités Rwandaises : une fois à Bruxelles lors de la rencontre avec l'ambassadeur rwandais et une autre fois à Kigali lors d'un entretien de notre ambassadeur avec le ministre rwandais de la justice. La Belgique a, à cette occasion, insistée sur le fait que Madame Ingabire devait être bien traitée et qu'elle devait avoir un procès équitable. Nous avons aussi à chaque fois insisté sur le fait qu'un espace pour une opposition politique devait être créé dans la communauté Rwandaise, comme Madame de Bethune me l'avait demandé dans une entrevue personnelle.
L'Union Européenne suit aussi cette affaire de près. Le représentant spécial de l'Union Européenne pour la région des Grands Lacs, qui était à Kigali il y a une dizaine de jours, a
appelé les autorités rwandaises à faire en sorte que son procès ait lieu vite et en toute transparence. Madame Sabine de Bethune (CD&V) – J'insiste sur le fait que notre mission à Kigali suit la situation de Madame Ingabire de près et veille à ce qu'elle ait effectivement un procès équitable, sur lequel ministre Vanackere a insisté. Nous devons suivre de très près ce cas concret, ainsi que les droits d'une opposition démocratique au Rwanda et dans les autres pays de la région.
Avec les élections de l'été passé en arrière-plan, j'insiste aussi sur le fait que notre pays ne se concerte pas seulement avec le Rwanda, mais mette aussi ce pays sous pression afin qu'il respecte mieux les droits politiques et démocratiques de ses citoyens. Nous disposons de plusieurs leviers pour faire ceci, allant de la concertation à des contacts internationaux, la coopération, ... Certains pays entretiennent des relations privilégiées avec le Rwanda, mais il est d'une grande importance que tout le monde en Europe adopte le même langage avec le Rwanda, un langage qui mène à bien non seulement le pays mais aussi les citoyens.
Traduction par http://www.jambonews.net/