Une religieuse dans la tourmente : Sœur Marie Christine Nyirahabimana, cible du régime rwandais jusqu'en exil !

Publié le par Veritas

Lorsqu’on évoque le Front Patriotique Rwandais (FPR), le parti au pouvoir à Kigali dirigé par le président Paul Kagame, l’image d’un régime autoritaire et inflexible surgit immédiatement. Critiqué pour son intolérance à toute dissidence, le FPR est accusé de méthodes brutales allant de l’intimidation à l’emprisonnement, voire à l’élimination physique de ses opposants. Mais au-delà des frontières du Rwanda, son influence se prolonge jusque dans la région des Grands Lacs, où son ombre continue de planer sur les figures religieuses qui refusent de se plier à sa ligne politique. C’est le cas de Sœur Marie Christine Nyirahabimana.

Depuis qu'Antoine Kambanda a été nommé cardinal, l'Église catholique du Rwanda est passée sous le contrôle de Paul Kagame et du FPR.

Depuis la prise du pouvoir par le FPR en 1994, l’Église catholique rwandaise – et plus particulièrement ses membres issus de l’ethnie hutu – semble constamment dans le viseur du régime. L’assassinat de plusieurs évêques à Gakurazo la même année reste à ce jour un traumatisme non reconnu officiellement, les cérémonies funéraires dignes de ce nom n’ayant jamais eu lieu.

Aujourd’hui, la stratégie du régime semble s’être complexifiée : en plus de viser directement les dissidents, il instrumentalise certaines figures religieuses tutsies pour affaiblir et surveiller leurs pairs. Selon plusieurs témoignages concordants, ces religieux serviraient également de relais à la propagande du groupe armé M23, soutenu selon des rapports onusiens par le régime de Kigali.

Un engagement spirituel devenu chemin de croix.

Au cœur de cette tempête, Sœur Marie Christine Nyirahabimana incarne la figure d’une foi inébranlable et d’un courage silencieux. Entrée en vie religieuse en 1993 au sein de la congrégation des Pallottines, elle a très tôt été confrontée aux épreuves politiques et ethniques qui minent son pays. Son refus catégorique de participer à la fabrication de faux témoignages contre les militaires français de l’opération Turquoise, ainsi que sa dénonciation implicite du soutien apporté au M23, ont fait d’elle une cible privilégiée du régime.

Issue d’une famille hutu originaire de l’ancienne préfecture de Kigali Ngari, elle a été trahie par un informateur présumé proche du régime, un certain Emmanuel, qui aurait transmis des informations à son sujet en raison de liens familiaux avec sa hiérarchie. Après un passage en France pendant le génocide, elle est retournée au Rwanda en 1996, avant d’être envoyée en République Démocratique du Congo (RDC) dans la province du Nord-Kivu.

L'exil et la traque continuent.

la congrégation des Pallottines au Rwanda

De mission en mission – à Keshero (2007), puis à Rutshuru-Murambi (2019) – Sœur Marie Christine Nyirahabimana n’a cessé de faire preuve de résilience, bien que les pressions se soient intensifiées. À Goma comme à Rutshuru, les religieuses proches d’elle témoignent d’un climat de peur croissant, alimenté par la présence des milices du M23. Des sources rapportent même qu’un groupe armé serait venu la chercher au couvent sans succès, une tentative d’enlèvement manquée qui souligne la gravité des menaces pesant sur elle.

Plus inquiétant encore, certains membres de sa famille restés au Rwanda sont régulièrement interrogés sur sa localisation et ses activités. Ce harcèlement s’étend désormais à ses proches amies au sein de sa congrégation, suspectées d’être complices ou solidaires.

Un silence lourd de sens

Face à une telle adversité, Sœur Marie Christine Nyirahabimana aurait pris la décision de quitter les ordres, bien que cette information n’ait pas été confirmée officiellement. Ce retrait serait une ultime tentative pour préserver sa sécurité, après des années de persécutions et de pressions. Actuellement, son sort reste incertain : certains évoquent un lieu sûr, d'autres s’inquiètent pour sa santé.

Quoi qu’il en soit, l’histoire de Sœur Marie Christine Nyirahabimana résonne aujourd’hui comme le témoignage bouleversant d’une conscience qui refuse de se taire. Elle incarne le courage d’une femme d’Église qui, face à la tyrannie et à la manipulation, a choisi la vérité au prix de sa liberté et peut-être de sa vie.

Par Seyanga Rutshuru | VeritasInfo

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