Région des Grands lacs : partie corsée pour Paul Kagame

Publié le par veritas

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Il ne fait aucun doute que quelque chose a changé dans le rapport du président rwandais avec la communauté internationale, l’ONU en tête. En tout cas, tout semble indiquer qu’il est dans le collimateur de l’Occident. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ses relations avec les capitales occidentales qui ont jusqu’ici porté son régime à bout de bras, se sont visiblement distendues. Rien ne sera plus comme avant, quand il pouvait impunément s’illustrer par une outrancière ingérence dans les affaires de son grand voisin, la RD-Congo. En effet, le Rwanda s’est vu suspendre l’aide de Washington, Londres et Amsterdam. La faute à un rapport publié le 27 juin 2012 par un groupe d’experts des Nations unies. Plusieurs témoignages cités par les documents et certaines ONG accusent l’armée rwandaise, dont le patron n’est autre que Paul Kagame, d’organiser un entraînement discret dans le camp de Kanombe et de fournir des renforts destinés aux miliciens du M23, la nouvelle trouvaille du Rwanda. 

Même les dirigeants de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC) ont directement mis en cause le 18 août, à l'occasion de leur sommet annuel, à Maputo, la participation du Rwanda dans le conflit dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), lui enjoignant de cesser son assistance au groupe rebelle M23. S'inquiétant de la situation dans la région, ils ont « noté que cela est causé par des groupes rebelles bénéficiant de l'assistance du Rwanda, et ont exhorté le Rwanda à cesser immédiatement ses interférences, qui constituent une menace pour la paix et la stabilité », selon leur communiqué final. Ils ont mandaté le chef de l'organisation régionale, le président mozambicain, Armando Guebuza, à se rendre au Rwanda afin de s’entretenir avec les autorités pour les exhorter à mettre fin à leur appui militaire aux rebelles du M23. 
  
Une accusation que les autorités rwandaises rejettent du bout des lèvres. Comme à son habitude, Kigali a qualifié ce rapport de « partial et malhonnête » et a usé d’arguments aussi dilatoires que peu convaincants. Pour Kagame et ses proches qui jouent les seigneurs de guerre dans la région des Grands lacs, la partialité des rapporteurs onusiens s’expliquerait par les « convictions personnelles » du coordonnateur, l’Américain Steve Hege, accusé de sympathie avec les rebelles hutus des Forces démocratiques de libération du Rwanda. Mais à force d’user et d’abuser de cet argument, Kagame et les siens, prompts à taxer de « négationnistes » tous ceux qui pointent du doigt leur proportion à déstabiliser le voisin congolais dans le seul objectif de se servir de ses richesses, ont de plus en plus du mal à convaincre leurs protecteurs occidentaux qui les ont laissé faire depuis plusieurs années, aidés en cela par des militants qui trient entre bons et méchants morts en usant du tamis de la repentance. 

Tant il est vrai que « la fin des idéologies a permis l’émergence d’un nouveau militantisme qui, sous le respectable prétexte d’aider les pays pauvres d’Afrique, ne les regarde que par le prisme déformée de la faute originelle de l’esclavage, censée se perpétuer jusqu’à aujourd’hui par le biais du colonialisme, puis du néocolonialisme ». Pourvu que les intérêts stratégiques de certains États occidentaux, comme les États-Unis,  qui ne se seraient pas associés à la colonisation, soient protégés. Sinon, on n’aurait pas connu tant de morts.  Car, comme le souligne le journaliste et écrivain Pierre Péan, « depuis la fin de la guerre froide, cette région des Grands lacs est devenue celle de la mort et du malheur dans une indifférence quasi générale. Avec deux millions de Rwandais exterminés en 1994, à l’intérieur du Rwanda, plus de six millions de morts rwandais et congolais dans l’ex-Zaïre, des centaines de milliers de Soudanais tués, de nombreuses victimes ougandaises, plus d’un demi-million de morts angolais, des millions de déplacés, quatre chefs d’État et des centaines de ministres et autres dirigeants assassinés, des dizaines de milliers de femmes violées, des pillages éhontés, cette zone a le triste privilège d’avoir subi plus de dommages que ceux additionnés de toutes les guerres intervenues de par le monde depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale ». 

Pourtant, la justice internationale, bras justicier des Occidentaux, et un grand nombre de médias des pays dits riches, toujours prêts à vitupérer les « dictateurs africains » qui auraient du sang sur les mains, n’ont jamais rien vu, jamais rien entendu des agissements des actuelles autorités rwandaises qui se sont hélas transformées en de vulgaires trafiquants des richesses dont regorge le fabuleux sous-sol de la République démocratique du Congo. Même le quidam Sarkozy avait poussé l’irresponsable culot jusqu’à proposer une « gestion commune » de ces richesses entre la RDC et le Rwanda.  

Jusqu’ici, Paul Kagame, ancien chef rebelle qui a troqué son treillis contre le respectable costume de ville, formé en Ouganda et aux États-Unis, et qui dispose aussi de relais en France, représentait, aux yeux des puissances étrangères, un allié de choix. À cause des rivalités entre ces puissances occidentales qui cherchaient par tous les moyens à s’évincer de cette zone géographie, certains pays, comme les États-Unis, n’ont pas hésité à déployer une débauche d’énergie, depuis 1994, pour organiser et garantir l’impunité du soldat Kagame. Dès lors, certaines capitales occidentales ont rivalisé de cajoleries pour le garder dans leur escarcelle, même lorsqu’elles étaient convaincues que l’actuel président rwandais pouvait être le commanditaire de l’attentat contre l’avion de Juvénal Habyarimana, son prédécesseur, et que cet attentat était à l’origine du génocide rwandais d’avril 1994. 
Mais aujourd’hui, à force de jouer les « gros bras » dans la sous région, Paul Kagame a fini par lasser ceux qui étaient bien disposés à son égard, y compris ses protecteurs de naguère, qui commencent à montrer des signes d’impatience et lui demandent quelques comptes. Le ciel s’est donc manifestement obscurci pour le Front patriotique rwandais (FPR) et Paul Kagame, qui devront désormais s’habituer aux critiques de l’ONU. Il faudra donc suivre cette nouvelle tendance avec beaucoup d’attention. Peut-être qu’elle débouchera sur une résolution définitive de l’équation Kagame, qui fait partie ou plutôt qui est  le problème de la région des Grands lacs.     

 

source:afriquenouvelle.fr


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